Un rapport publié ce printemps par l’ONG Oxfam vient rappeler, chiffres à l’appui, que la rémunération des PDG a augmenté bien plus rapidement que celle des salariés ces dix dernières années. Au point d’atteindre des écarts vertigineux.
Entre 2011 et 2021, le partage des richesses en France a évolué, et ce ne sont pas les salariés qui en ont le plus profité. Dans son étude intitulée Inégalités salariales : aux grandes entreprises les gros écarts, Oxfam analyse la rémunération des dirigeants des grandes entreprises françaises et la redistribution de la valeur ajoutée.
Premier enseignement : la part dédiée à la rémunération du travail dans la valeur ajoutée des 100 plus grandes entreprises françaises cotées en bourse a baissé en dix ans, passant de 61 % à 51 %. En se limitant aux entreprises du CAC 40, cette part est passée de 58 % à 48 %. En cause, selon Oxfam : les superprofits générés lors de la reprise économique qui ont été captés par les marchés financiers.
Autrement dit, si la répartition de la valeur ajoutée n’avait pas évolué dans les 100 plus grandes entreprises françaises cotées en bourse, cela représenterait un chèque moyen de 8 914 euros par salarié, soit au total 62 milliards d’euros, avance l’ONG.
Un salaire 1 484 fois supérieur à celui des salariés !
Pendant ce temps, la rémunération des dirigeants s’est littéralement envolée. Toujours entre 2011 et 2021, les PDG des 100 plus grandes entreprises françaises ont connu une augmentation de leur salaire de 66%, contre 21% pour les salariés. Et les fossés se sont creusés : le quotient de rémunération entre le salaire des dirigeants et le salaire moyen est passé de 64 à 97.
Autrement dit, les dirigeants touchent en 2021 un salaire 97 fois supérieur au salaire moyen des entreprises. Et dans les entreprises du CAC 40, c’est encore pire : ce rapport est passé de 93 à 163. Ces chiffres sont des moyennes car certaines entreprises surperforment dans ce domaine.
Chez Téléperformance, une entreprise de centres d’appels, le PDG gagne 1 484 fois le salaire moyen de l’entreprise. Du côté du constructeur automobile Stellantis (réunion des groupes Peugeot-Citroën et Fiat-Chrysler), le rapport entre la rémunération du PDG et le salaire moyen est de 1 139. « Le dirigeant de Stellantis gagne en 3h22 l’équivalent du salaire annuel moyen dans son entreprise », précise le document d’Oxfam. Enfin, à la troisième place de ce podium, on retrouve l’éditeur de logiciel Dassault Systèmes, dont le PDG gagne 385 fois le salaire moyen.
Oxfam pointe aussi les problèmes liés à la structure des rémunérations des dirigeants. Celles-ci sont bien souvent composées d’une partie liée à des objectifs financiers, « incitant ainsi les dirigeants à privilégier l’intérêt financier à court terme des actionnaires plutôt que l’intérêt à long terme de l’entreprise et de l’ensemble de ses parties prenantes, en premier les salariés. ».
L’ONG tient quand même à signaler les bonnes pratiques de certaines entreprises. Il s’agit essentiellement des entreprises publiques, pour lesquelles la rémunération des dirigeants est encadrée par la loi depuis 2012.
Le think tank britannique High Pay Centre a d’ailleurs créé un indicateur nommé « High Pay Day » : c’est la date à laquelle les PDG ont gagné autant que la rémunération moyenne annuelle des salariés. En France, en 2022, il ne fallait que six jours pour qu’un PDG moyen touche autant qu’un salarié moyen en un an. Le High Pay Day 2022 était donc le 6 janvier à 11h35.
S’il y a des écarts entre les hauts et les bas salaires, il y a aussi des écarts entre les hommes et les femmes dirigeant(e)s d’entreprises. L’étude d’Oxfam pointe que les femmes dirigeantes gagnent en moyenne 3,1 millions d’euros. C’est 36 % de moins que les hommes (4,9 millions d’euros). Parmi les 120 plus grandes entreprises françaises cotées en bourse, on compte six femmes PDG, sept directrices générales et huit présidentes de conseil d’administration.
Ce qu’en dit la CFDT :
Selon les sources disponibles (bilans sociaux, internet), les plus hauts salaires chez SAFRAN HE sont entre 5 et 10 fois supérieurs au salaire moyen, et le salaire du Président Directeur du Groupe est (avec une part variable de l'ordre de 50%) environ 40 fois supérieur au salaire moyen de Safran HE.
Safran n’est donc pas à la pointe des délires du capitalisme décomplexé, mais les tendances lourdes y sont tout de même à l’œuvre.
La politique du Groupe consiste, comme dans les grands groupes de même nature, à privilégier le résultat et la distribution vers les actionnaires et les dirigeants.
Pour la CFDT, cette politique a un coût :
- Coût pour les salariés : souffrance au travail, relations sociales dégradées dans les équipes à cause d’une pression toujours plus forte, tension permanente sur les effectifs… et sur la rémunération !
- Coût pour l’entreprise : la pression s’exerce aussi sur les investissements, chaque année amputés au titre des « atterrissages budgétaires », ce qui compromet la capacité de l’entreprise à s’adapter et préparer l’avenir.
- Coût sociétal et environnemental : les grands groupes et leurs dirigeants sont très bien équipés pour diminuer la pression fiscale. A l’heure où l’urgence climatique et environnementale n’est plus à démontrer, où l’Etat et les services publics peinent à assurer le minimum vital, la répartition des richesses et des produits du travail est à questionner et réformer, de manière urgente.
La mobilisation des salariés, pour de meilleurs salaires, de bonnes conditions de travail, pour un système de retraites juste, était et reste légitime. Le statut social de Safran HE n’est pas « exorbitant » (s’il l’est, que dire de celui des dirigeants !).
Une mobilisation intersyndicale est en préparation pour le 13 octobre prochain contre l’austérité, pour l’égalité Hommes-Femmes, pour une meilleure répartition des richesses.
Mobilisons nous !!